Bertin Mampaka (MR) sauvé par le Parlement bruxellois, qui rejette la demande de levée d’immunité
Le Parlement bruxellois devait se prononcer ce jeudi sur la levée d’immunité parlementaire du député bruxellois, inculpé pour “prise illégale d’intérêt” dans le cadre de l’affaire Milquet. Il ne pourra donc pas être poursuivi par le parquet.
- Publié le 02-05-2024 à 11h34
- Mis à jour le 07-05-2024 à 09h40
La décision était attendue depuis le 11 mars, lorsque le bureau élargi du Parlement bruxellois a convoqué la commission des poursuites au sujet de Bertin Mampaka (MR). Le procureur du Roi, en effet, avait demandé la levée d’immunité du député bruxellois, inculpé pour “prise illégale d’intérêt” dans le cadre de l’affaire Milquet.
Ce jeudi matin, lors d’une séance plénière qui s’est déroulée à huis clos, les parlementaires bruxellois se sont prononcés contre la demande d’autorisation des poursuites à charge de Bertin Mampaka, qui a été auditionné devant le Parlement.
Face aux députés, l’ex-élu CDH a souligné en substance le fait que, selon lui, le dossier ne comportait rien de compromettant le concernant et que l’affaire, proche de la prescription, datait d’il y a une dizaine d’années.
Le vote s’est déroulé à huis clos et le détail des positions exprimées est donc secret. Mais Bertin Mampaka a été “sauvé” par une large majorité de ses collègues députés.
Les députés, en pratique, se sont exprimés sur les conclusions de la Commission des poursuites du Parlement bruxellois, qui s’était prononcé contre la levée d’immunité, et sur celles de la Cocof, qui avait voté pour.
Sur les 68 députés du Parlement bruxellois qui se sont prononcés ce jeudi, 39 ont ainsi voté contre la demande de levée d’immunité, 22 pour et 6 abstentions. Le vote de la Cocof (commission communautaire française) a finalement débouché sur le même résultat. Il n’y aura donc pas de levée d’immunité pour Bertin Mampaka, qui ne pourra pas être poursuivi par le parquet.
Écolo a voté pour la levée d’immunité
”J’ai voté en mon âme et conscience, avec le respect de la transparence et de l’éthique en politique, qui est au cœur des valeurs d’Écolo. Je pense que tous les députés écolos ont eu cette vision”, nous précise Kalvin Soiresse (Écolo), président de la commission des poursuites de la Cocof.
Seuls les écologistes revendiquent d’avoir voté d’un bloc en faveur de la levée d’immunité.
Les autres partis ont été plus divisés et ont globalement exprimé un point de vue contraire à celui des verts. Chez les Engagés et Défi, aucune consigne de vote n’a été donnée. Le PS a voté contre la levée, de même que le MR, auquel appartient Bertin Mampaka. Mais même chez les libéraux, le vote n’a pas été, nous dit-on, unanime.
”Je note que même une partie des députés PTB a voté contre la levée d’immunité (Ndlr: il apparait qu'il s'agirait en fait d'abstentions et non de vote contre), ce qui peut étonner vu leur discours de dénonciation des privilèges des députés, ajoute un écologiste. Il y a en fait une forme de corporatisme au sein du Parlement, qui a conduit à protéger l’un des leurs.”
”Aujourd’hui on doit se prononcer sur une demande de levée d’immunité parlementaire. Un dossier sans pièces."
L’issue du vote, qui fait les affaires du MR, ne doit rien à une manœuvre tactique géniale des libéraux. Mais plutôt à la conjonction de plusieurs facteurs qui ont amené les députés à rejeter la demande du parquet sur le fond mais aussi sur la forme.
“J’ai confiance en la justice, mais cette manœuvre à 3 mois des élections, plus de 10 ans après le début de l’affaire Milquet, est plus qu’étonnante”, avait confié Bertin Mampaka à La Libre, le 12 mars, s’étonnant de la demande tardive de levée d’immunité parlementaire du parquet, qui l’avait entendu pour la dernière fois “en mars 2016”.
Le même argument a été repris par plusieurs élus, lors des discussions, en particulier par des députés néerlandophones.
”En commission, il y a eu des arguments pour et des arguments contre. Ceux qui étaient contre ont trouvé que le timing posait question. Et que le procureur aurait déjà dû avoir le temps de convoquer depuis longtemps M. Mampaka devant un tribunal. Plusieurs députés ont aussi souligné le fait que le dossier n’était pas complet”, nous indique un élu. “Les pour estimaient au contraire qu’il ne fallait pas forcément avoir le dossier complet pour trancher, car les députés ne doivent pas juger du fond de l’affaire, pour lever l’immunité.”
Le Parlement bruxellois compte bon nombre de juristes qui ont vu d’un mauvais œil la manœuvre des autorités judiciaires à l’encontre de l’un des leurs.
Certains, parmi eux, ont aussi refusé de devoir se prononcer sans avoir accès au dossier judiciaire.
”Un dossier sans pièces”
”Aujourd’hui, on doit se prononcer sur une demande de levée d’immunité parlementaire. Un dossier sans pièces. J’ai demandé au parquet de consulter le dossier complet. Sans succès. Autant supprimer l’immunité parlementaire et arrêter de nous faire perdre notre temps”, a dénoncé Emmanuel De Bock, chef de groupe Défi, sur X. Dans ces conditions, le député amarante a voté contre la levée d’immunité.
Pour rappel, plusieurs collaborateurs de Joëlle Milquet, pour laquelle une levée d’immunité a également été demandée, sont dans le collimateur des enquêteurs dans le cadre du dossier sur les collaborateurs litigieux engagés au cabinet par celle qui était alors ministre de l’Intérieur, avant les élections 2014.