Camille Lellouche : "Ne me jugez pas…"
La chanteuse française Camille Lellouche se confie, à cœur ouvert. Aujourd’hui célèbre, notamment après son duo “Mais je t’aime” avec Grand Corps Malade. Ses concerts sont sold out. Sa vie n’a pas été un long fleuve tranquille. Pendant deux ans, elle a vécu sous l’emprise d’un pervers.
- Publié le 28-04-2024 à 08h00
- Mis à jour le 07-05-2024 à 16h58
En voiture
Paris. Gare du Nord. Quai 14. Direction Lille. Voiture 1. Elle m’attend, côté fenêtre. Les cheveux tirés en arrière, un large sourire. À peine le convoi a-t-il démarré que notre voisin se lève et dit : “Si mes filles apprennent que j’ai voyagé à côté de Camille Lellouche, et que je reviens sans un selfie, elles seront vraiment fâchées et déçues… ! ” L’artiste se prête volontiers à la séance photo.
On y va ? On a une heure… Je lui ai accroché un micro “cravate” afin que son récit reste discret. Elle parle à voix basse, mais il y a beaucoup d’expression dans ses yeux, sur son visage. Ses mains bougent aussi. Elle est concentrée même si elle regarde souvent son téléphone. Une addiction. Juste pour voir son trésor, Alma, sa fille adorée. Je comprends…
Au début, elle se raconte sobrement. Comme dans le livre “Tout te dire” (Éd. Stock), un dialogue avec sa fille mais qui s’adresse aussi aux femmes qui, comme elle, ont vécu des violences conjugales. Elle a écrit en tant que femme, libre, indépendante, pour que les femmes osent dénoncer les situations douloureuses qu’elles vivent. Elle a mis 15 ans à guérir.
Camille Lellouche a retrouvé un certain équilibre. Hier humoriste (elle a rempli toutes les salles de France avec son spectacle “Camille en vrai”), aujourd’hui enfin chanteuse reconnue, respectée, elle prépare un deuxième album, plus solaire annonce-t-elle. Son premier opus contenait des chansons qui resteront, comme “Ne me jugez pas… ”.
Dans quelle famille avez-vous grandi ?
Une famille très aimante, un endroit où on se sentait en sécurité. J’ai été très heureuse. J’ai eu une belle enfance, avec beaucoup, beaucoup, beaucoup d’amour. J’avais un lien puissant, magnifique aussi, avec mes grands-parents. J’étais une enfant épanouie. Pour moi, la vie, naïvement, était sublime.
C’est surtout votre maman qui a forgé votre caractère… Elle vous répétait : “Pour réussir dans la vie, vous n’avez besoin de personne, juste de votre travail”.
C’est une grande bosseuse et, en même temps, elle a toujours fait preuve d’une grande humilité. Elle m’a transmis cela. Elle me disait : “Ne compte jamais ni sur un homme, ni sur qui que ce soit. Ne dépends jamais de personne… ”
Quelle enfant étiez-vous ? Un peu garçon manqué… ?
Oui, c’est vrai. Mais après, la vie a fait que mon caractère s’est forgé différemment. J’ai un petit frère. Nous avons toujours été très proches. C’est mon meilleur ami. Il travaille beaucoup : il est chef cuisinier dans son propre restaurant.
Quelles valeurs vos parents vous ont-ils transmises ?
La tolérance ! C’est essentiel. La tolérance, c’est aimer les autres, ne pas juger…
Est-ce votre grand-père qui vous a transmis cette tolérance ? Il a fait preuve d’un incroyable courage pendant la Deuxième guerre mondiale…
Il était catholique, ma grand-mère était juive. Et par solidarité avec la communauté juive, il a cousu une étoile jaune sur le revers de son veston. C’est couillu, non ? Parce qu’il risquait sa vie…
Votre grand-mère et sa sœur ont été déportées. Lui aussi. Et ils sont revenus vivants de cette horreur…
Oui, c’est incroyable. Les histoires sont différentes. Ma grand-mère et ma grand-tante étaient dans un camp d’extermination, et lui, dans un camp de travail. Il s’est enfui et elles se sont un jour retrouvées sans surveillant. L’histoire est longue mais ils sont tous revenus.
Vous racontez dans votre livre "Tout te dire" que, même après tant d’épreuves, ils ne se sont jamais plaints…
Jamais, jamais. C’est fou. En réalité, ils n’en ont jamais parlé. C’est moi qui, un jour, en ai discuté avec mon grand-père parce que ma mère me l’avait raconté. Je l’ai un peu forcé, je crois. Il a écrit un livre “Les coquelicots de la liberté” : je le ferai rééditer plus tard. Ma grand-mère, elle, n’a jamais voulu ou pu en dire un mot.
Votre mère était assez exigeante…
C’est vrai. Même quand j’avais un peu de fièvre, je devais aller à l’école, quitte à ce qu’elle vienne me rechercher.
Vous écrivez : il est bien de craindre un peu ses parents…
Parce que je pense qu’on respecte les gens qu’on craint. Je parle de crainte dans le bon sens du terme, de respect, et pas de peur…
Vous lui en avez voulu lorsqu’elle a quitté votre papa…
À l’époque, je lui en ai voulu, c’était comme une trahison pour moi. Plus tard, j’ai compris que, parfois, la séparation est une solution. Voire un acte de courage.
À l’âge de quatre ans, on vous a installée devant un piano…
En fait, je n’en avais pas vraiment envie. J’ai suivi deux cours de trente minutes, et puis fini. J’ai recommencé à six ans avec une professeure, Madame Salignon, qui m’a suivie pendant 20 ans.
Elle était dure avec vous…
Il lui est arrivé de me taper sur le bout des doigts avec son crayon. Ce n’était pas méchant, mais elle me répétait : concentre-toi ! Je l’aimais, je la respectais. Elle ne supportait pas me voir en jeans et baskets. Elle voulait toujours que je sois en robe et petites socquettes. C’était une autre époque…
Vous avez suivi des cours de musique-études…
J’avais quatre heures de cours de piano tous les matins. Ensuite, j’allais à l’école. Et le soir, je refaisais du piano. Donc six heures de piano par jour ! …
Et un jour, vous lui avez annoncé que vous ne vouliez pas être pianiste, mais chanteuse… !
Parce que mon premier amour, c’est la musique. Déjà, quand j’avais sept ou huit ans et que je regardais des émissions de variétés à la télévision, je savais que j’avais envie d’être chanteuse. J’adorais écouter Dana Dawson qui chantait “Tell me Bonita". Ou alors Céline Dion.
"J’étais gentille avec les autres uniquement quand j’avais bu"
Faisons un bond dans le temps. Pour financer vos études, vous trouvez un job de serveuse à la "Terrasse des archives" à Paris. Là, vous aviez des clients connus…
En effet, cet endroit était fréquenté par beaucoup d’artistes. Je n’ai jamais pris de drogue dure. En revanche, j’ai commencé à boire et je suis devenue alcoolique. À ce moment-là, je ne m’en suis pas rendu compte. Je buvais un peu tous les jours. Quand j’arrêtais, je faisais des crises de manque. Je pouvais boire une bouteille d’alcool sans être vraiment ivre alors que j’étais très menue, vraiment très mince.
Que vous apportait l’alcool ?
J’essayais de m’évader, mais en réalité, je ne m’évadais pas du tout. Je me réveillais avec des gueules pas possibles. Le problème est que si je ne buvais pas, je n’arrivais pas à dormir ni à parler aux gens. Je devenais agressive, associable, malheureuse. J’étais gentille avec les autres uniquement quand j’avais bu. L’horreur.
Malgré cette addiction, vous avez continué à travailler. Vous êtes drôle, vous faisiez rire les clients de la brasserie. Et un jour, vous êtes repérée par une réalisatrice, Rebecca Ziotowski.
Elle m’a proposé de jouer dans le film “Grand central”. Pendant le tournage, j’ai rencontré Denis Ménochet qui m'a dit : “Tu devrais faire un “one woman show”. Je n’y croyais pas trop, j’étais dans la galère, j’étais serveuse, je voulais être chanteuse. Mais il avait raison : c’est ce qui a marché en premier lieu. J’ai créé une galerie de portraits de femmes que j’avais l’habitude de servir. J’ai imité leur manière de parler, de s’exprimer, de se mouvoir, leurs accents. Tout me parlait : les origines, leur milieu social.
Mais il a fallu du temps pour que cela marche…
Oui, parce que sur le plan personnel, c’était très compliqué. Je suis retournée vivre chez ma mère. Ma mère, c’est mon socle. Son amour et sa confiance en moi m’ont sauvée. Elle m’a remise sur les rails. Elle a toujours été fière de moi…
Vous avez fait de nouvelles rencontres…
Laurent Junca, qui m’a fait tourner de petites vidéos avec son frère, l’humoriste Titoff, et d’autres. Laurent trouvait que j’avais un certain don pour faire rire. Mais moi, je m’obstinais, je ne voulais pas seulement faire rire. Je voulais être sur scène, d’accord, mais aussi pour faire pleurer et surtout pour jouer du piano. Cet objectif est resté dans un coin de ma tête et, en attendant, j’ai fait rire les gens avec le spectacle "Camille en vrai" que nous avons coécrit, Laurent et moi. J’ai tourné partout en France, en Belgique, en Suisse, pendant sept ans. Au total, plus de 450 représentations, dans des petites salles, puis des plus grandes, et aussi une tournée des Zéniths en France.
Vous avez donc fini par atteindre votre rêve : devenir chanteuse.
Mais là aussi, il a fallu du temps : j’ai participé à plusieurs concours. D’abord “Nouvelle star”, puis “The Voice”, où j’ai terminé en demi-finale. Quelle expérience ! Nous avons été très bien accompagnés, surtout par les coachs de l’ombre, parce que les coachs officiels ne peuvent pas vous suivre tout le temps. Les vrais coachs font en sorte que l’on soit prête, préparée. Le mien a été exceptionnel.
J’ai raconté mon histoire douloureuse comme un devoir en tant que femme indépendante et connue
Avec votre premier album intitulé sobrement "A", vous avez pris beaucoup de monde de court. Ceux qui ne vous connaissaient pas ou ne voyaient en vous que l'humoriste ont compris que votre vie n'avait pas été un long fleuve tranquille…
Je crois que je me suis vraiment libérée en chantant. Je me libère, j’enlève une partie de ma pudeur, je me livre sans tricher.
C’est à ce moment-là que l’on a compris que vous aviez traversé des moments très difficiles. Les paroles de "N’insistez pas", sur les violences conjugales, sont particulièrement touchantes. Pouvez-vous en parler… ?
J’ai voulu interpréter mon vécu. Car ma vie privée n’a pas toujours été joyeuse. Il y a des gens qui m’ont fait du mal. En fait, ce premier album, je pense que c’était comme un journal intime. C’est venu libérer tout ce que j’avais dû encaisser.
Avant de raconter cet épisode dans le livre, vous aviez décidé de vous livrer dans l’émission "Sept à huit". Pourquoi ce besoin de tout dire ?
J’en avais besoin. Cela devenait assez vital. Je ne voulais pas mourir, mais c’était vital pour ma santé. J’écrivais des chansons dans lesquelles je parlais du sujet, mais je ne disais pas ce qui m’était arrivé. Et cela me bouffait de l’intérieur. J’avais l’impression que ça ne passerait pas tant que je n’en aurais pas parlé. Et puis, j’ai fait cela surtout comme un devoir en tant que femme, en tant que femme indépendante et connue. Je me suis dit que j’avais ce devoir de libérer la parole et de dire aux gens : malgré ma grande gueule, malgré mon parcours, malgré tout ce que je fais, voilà ce qui m’est arrivé.
Vous avez donc vécu pendant deux ans, de 19 à 21 ans, avec un pervers cruel, qui vous a harcelée, frappée, violée…
Il était violent, pervers, jaloux. Enfant, il avait été battu, ce qui n’excuse rien. Je raconte tout dans le livre. Il m’a lobotomisée jusqu’à arriver à son but final : me détruire. Je vivais comme dans une secte. Quotidiennement, il me rabaissait. Il était sublime et il me disait : "Tu es squelettique, tu n’es pas désirable, tu es moche, tu es une merde, il n’y a que moi dans ta vie, tes parents ne t’aiment pas comme je t’aime, ils ne sont pas dans ton côté". Au début, je me disais: "Non, non, non, il ne t’aime pas". Et puis, j’ai fermé ma gueule jusqu’à perdre toutes mes forces. Je ne mangeais plus, j’avais des douleurs dans le ventre, de terribles angoisses. Une enfance heureuse ne protège pas d’une telle emprise.
Comment ont réagi les téléspectateurs, après l’émission et les lecteurs de "Tout te dire" ?
Quand je participe à des séances de dédicaces, beaucoup de femmes pleurent quand elles me voient. Certaines se sont déjà libérées, d'autres non. Alors elles me parlent. Je les encourage. Vous savez qu’il y a aussi, c’est une minorité, mais il y en a, des hommes qui sont victimes de violences psychologiques et physiques. Mais ils ont honte d’en parler parce qu’ils sont censés être physiquement plus puissants. C’est aussi une réalité et j’en parle chaque fois, parce que toutes les violences sont inacceptables. Celles faites aux femmes, dans la toute grande majorité, mais aussi à des hommes. Dire "je suis un homme et je vis des violences" doit être encore plus difficile.
Qui vous a sauvée ?
Ma mère ! Elle m’a écoutée, m'a conseillé de partir. Je suis allée en Angleterre pour sortir des griffes de cet homme. Je suis revenue et j’ai tenté de reprendre pied. Mais en réalité, j’ai mis 15 ans à m’en sortir… Quinze ans !
Ecrire des chansons est une forme de thérapie
Reprenons le fil de votre carrière. Avec Grand corps malade, vous avez reçu la Victoire de la chanson la plus originale pour le titre "Mais je t’aime"… Quelle est l’origine de cette chanson ?
Fabien Marsaud, alias Grand Corps Malade, m’a proposé de figurer dans l’album de duos avec des chanteuses. Il m’a demandé si j’avais un texte en particulier. J’ai eu un flash à ce moment-là : une chanson que j’avais déjà écrite et composée deux ans auparavant. Mais je la trouvais incomplète. Je me suis mise au piano. C’était assez magique. Et il a improvisé dessus. Fabien a apporté des réponses aux questions que je me posais. Le succès a été phénoménal.
Écrire des chansons, est-ce une forme de thérapie ?
Oui, et ça l’est encore. Confier mes fêlures, mes brûlures, mes doutes, à une personne directement, ce n’est pas facile, alors je les chante. Pour composer, je laisse la mélodie venir à moi, j’enregistre des mémos musicaux sur mon téléphone… parfois à une heure avancée, comme si la musique était ma langue maternelle. À l’époque, il n’était pas dans mes habitudes de coucher le bonheur sur papier, c’était plutôt le malheur. Mais le deuxième album que je prépare sera plus solaire !
Aujourd’hui ?
Je suis dans une phase où je retrouve ma créativité. Mais là, je suis très connectée à ma fille… Il faut que je me reconcentre un peu sur moi…
Vous êtes en effet devenue la maman d’une petite Alma, pour laquelle vous avez écrit ce livre "Tout te dire". Depuis que le train a démarré, vous regardez beaucoup votre écran pour la voir…
Ah oui, pardon. Je sais, c’est excessif, mais c’est viscéral. J’ai besoin de regarder cet écran pour la voir. Même à la maison, quand elle dort, je vais la regarder dormir. Mon mari, c’est encore pire. Bon maintenant, ça va mieux. Elle dort dans sa chambre. Elle a un an et demi. Mais si cela ne tenait qu’à moi, elle serait encore dans notre chambre…
Il faudrait lui donner un petit frère ou une petite sœur…
J’ai eu un accouchement vraiment très difficile. Je le raconte longuement dans le livre. Je ne sais pas si je recommencerai. Mon corps se remet à peine. Mais surtout, il faut du temps, de l’argent, pour avoir un enfant. Je n’ai qu’un petit appartement, soixante mètres carrés. Les gens pensent que tous les artistes sont millionnaires. Non ! Je gagne très bien ma vie par période, mais à d’autres, c’est plus compliqué. Là, ça va, heureusement, sinon j’arrête. Cela fait des années que je me bats : ce n’est pas pour galérer encore et encore…
Il ne me semble pas que vous faites ce métier pour gagner de l’argent…
Non, en effet, je fais ce métier pour être heureuse et libre. Et le fait d’avoir une facilité financière me permet de donner… Parce que moi, j’adore ça. J’aime gâter, j’aime donner, j’aime que les gens ne manquent de rien, tous les gens qui m’entourent, ma famille, ma belle-famille, mes amis, proches. Donc, pour ça, il faut de l’argent. Et puis, je suis exigeante avec moi-même, je ne connais pas d’autres manières de créer. L'inactivité me rend folle. Névrosée, même…
Il faudrait penser un peu plus à vous…
Oui, oui. Il faut que je pense un peu à moi. Mais voilà, je suis très maman. Hier, pour vous donner un exemple, j’étais au resto avec une amie. Je suis rentrée à 22h30. Ce qui est très tôt. C’était super, mais je n’ai pas profité.
Pourquoi ?
Parce qu’Alma n’était pas là. En tout cas, elle me manquait. Alors qu’elle dormait. Elle est très réglée. Elle se couche à 20 heures. Je me suis levée à 6 heures Je me suis occupée d’elle toute la journée.
Elle ne va pas à la crèche ?
Non, c’est mon mari et moi, parfois des nourrices, qui nous en occupons. Je veux en profiter au maximum.
Il faut qu’elle se sociabilise….
Mais elle est sociable ! On va au parc très souvent. Elle a les petits cousins. Elle adore les enfants. Mais la crèche, ce sera pour plus tard.
Ce n’est pas l’enfer, la crèche…
J’ai fait un enfant pour être avec elle. Je l’ai emmenée en tournée. Je suis vidée, mais je suis heureuse. Elle aussi. Elle est collée à moi. Oui, je sais, je suis poule, poule, poule.
Dans votre livre, vous dites à votre fille : "Ne te mets jamais en couple avec une personne qui t’impressionne".
Oui. Moi je pense qu’il faut être en couple avec quelqu’un que vous admirez, mais pas qui vous impressionne. C’est une nuance assez précise. Parce que quelqu’un qui vous impressionne peut forcément vous intimider, vous rabaisser. L’admiration, c’est plus sain.
Je suis très croyante, mais je ne pratique pas.
Comment allez vous maintenant ?
Je me sens beaucoup plus ancrée, solide, forte. Il m’a fallu ce temps-là pour reprendre confiance en moi, en mon physique, même en mon intelligence. J’ai la chance d’avoir un homme exceptionnel. Il ne m'encense pas, parce qu’il est dur, mais dans le bon sens, parce qu’il sait qui je suis. Heureusement qu’il est là : il me donne beaucoup d’amour. Il me dit les choses comme elles sont : je me sens beaucoup plus forte, plus vraie, dans l’équilibre. J’aime aussi la manière dont il est avec notre fille, quand il lui dit qu’elle est belle, intelligente. Le regard du papa sur sa fille est capital. J’aurais aimé que mon père me dise plus ça. La confiance qu’un homme peut donner à une femme, c’est très valorisant.
L’inverse est vrai aussi…
Oui, bien sûr…
Vous êtes d’origine juive, votre mari est musulman…
Oui, il respecte le ramadan. J’aime les gens qui pratiquent leur religion et qui ont la foi. Moi, j’ai la foi. Déjà, on est sur les mêmes longueurs d’onde. Moi, je suis très croyante, mais je ne pratique pas. Tout se passe très bien, les familles s’entendent bien. C’est génial.
Comment vous ressourcez-vous ?
J’aime bien être seule. J’aime lire. Ou alors juste ne rien faire… Mais c’est rare.
En quoi croyez-vous ?
Je crois en Dieu.
Pensez-vous à la mort ?
Souvent. C’est quand même particulier que vous me posiez cette question-là aujourd’hui... J’ai perdu mon tonton aujourd’hui. Je devais aller le voir et je n’ai pas eu le temps. Cela me fait de la peine. C’était mon tonton d’amour : il m’avait appelée il y a deux jours. Je le sens quand mes proches vont mourir. J’ai dit à maman : "Ah, il va partir, tonton". Ma foi grandit de jour en jour. Je pense souvent à Dieu. Quand on a la foi, on ne peut pas avoir peur de la mort. On sait ce qu’il y a après.
Qu’y a-t-il après la mort ?
De belles choses. On retrouve les gens qu’on a perdus. Ce qui me fait plus peur, c’est la manière dont je vais mourir et la peine que je vais faire aux gens qui vont rester. C’est ça, le pire.
Qu’est-ce qui vous a construite ?
L’amour. Vraiment.
Êtes-vous une femme heureuse ?
Aujourd’hui, oui. Fatiguée, mais heureuse. Je l’ai été très jeune avec mes grands-parents. Un peu moins dans ces années passées. Je le suis aujourd’hui.
Du côté de chez Proust
Quelle est votre vertu préférée ? La patience.
La qualité que vous préférez chez un homme ? Le courage.
Chez une femme ? Pareil.
Votre principal défaut ? L’impulsivité.
Votre principale qualité ? La générosité.
Quel serait votre plus grand malheur ? Perdre mes proches.
Votre auteur préféré ? Marc Levy, Joël Dicker et Delphine de Vigan.
Votre compositeur préféré ? Chopin.
Votre héros préféré dans la fiction ? Superman.
Qu’est-ce que vous détestez par-dessus tout ? Les cons. Il y en a beaucoup. Les racistes en particulier. Mais ils font parie des cons…
Quel est le don que vous auriez aimé avoir ? L’invisibilité. J’aurais aussi aimé savoir danser et courir.
Comment aimeriez-vous mourir ? En dormant. Évidemment.
Quelle est la faute, chez les autres, qui vous inspire le plus d’indulgence ? La maladresse.
Avez-vous une devise ou une phrase qui vous inspire ? Ne jamais lâcher, même quand c’est dur.