”Black Eagle” : qu’est-ce que ce trafic de cocaïne qui générait des millions d’euros ?
Chacun avait un rôle précis dans l’organisation criminelle.
- Publié le 16-04-2024 à 18h56
- Mis à jour le 16-04-2024 à 20h17
Ce sont des montants astronomiques qui donnent le tournis : sur à peine cinq mois, entre début avril et le 9 septembre 2021, les saisies de cocaïne réalisées sur l’organisation criminelle actuellement jugée à Bruxelles, représentaient un montant de 13,42 millions d’euros, a relevé mardi la procureure fédérale dans son réquisitoire.
Cela donne une idée de l’ampleur de ce trafic pour lequel 40 personnes sont jugées depuis le 8 avril dans ce dossier judiciaire au nom de code “Black Eagle” (”Aigle noir”, soit une référence au drapeau albanais). Il s’agit en effet quasi exclusivement d’albanophones ainsi que de quelques “chimistes” colombiens.
Quatre saisies avaient été effectuées sur la période de cinq mois : 8, 11 et 20 kg dans des voitures qui livraient l’étranger et 449 kg au port d’Anvers dans une cargaison de bananes dans laquelle avaient été découverts 6 689 kg de cocaïne. Le reste – soit 6 240 kg – était destiné à d’autres organisations criminelles.
L’enquête a ainsi montré qu’un des principaux prévenus, Alfredo H. était en contact avec des groupes mafieux italiens établis dans le Limbourg. Les deux organisations partageaient ainsi un entrepôt.
La procureure fédérale parvient donc à un montant de 13,42 millions d’euros vu que l’organisation vendait au prix de gros sa cocaïne à 27 500 euros le kilo.
L’organisation, a relevé la représentante du ministère public dans son réquisitoire, recevait la cocaïne sous différentes formes. Quand elle n’était pas dissimulée dans des caisses de bananes, la drogue pouvait être intégrée dans des produits : charbon, ciment, pulpe de fruits.
Il fallait alors l’extraire, d’où l’importance de disposer de “chimistes” venus de Colombie. En juin 2021, ce seront ainsi 7 000 litres de liquide qui seront découverts en perquisition dans un garage. Le liquide renfermait 800 kg de cocaïne.
Quand la cocaïne n'était pas dissimulée dans des caisses de bananes, elle pouvait être intégrée dans des produits: charbon, ciment ou pulpe de fruits.
À chacun sa spécialisation
Pour mener à bien ce trafic, à côté des dirigeants, l’organisation criminelle disposait d’hommes qui remplissaient des tâches bien précises : gestion des entrepôts, gestion de la “main-d’œuvre”. Il y avait des “observateurs”, qui surveillaient les quais des ports, des “extracteurs”, qui retiraient la cocaïne des conteneurs quand elle était cachée dans des sacs.
À cette fin, ces hommes pouvaient utiliser des canots pneumatiques, qui, dans les ports d’Anvers et de Gand, allaient à la rencontre des bateaux. Des hommes-grenouilles, munis de sacs étanches, retiraient la cocaïne. De grandes échelles étaient parfois utilisées pour parvenir à des conteneurs parfois empilés sur quatre étages. Ces conteneurs étaient parfois suivis grâce à des balises GPS dans l’attente du moment le plus propice pour retirer la drogue. Le travail de ces “extracteurs” était parfois facilité par des complicités internes dans les ports.
Il y avait aussi des “fournisseurs”, qui mettaient à disposition des locaux, des véhicules ou des canots. Il y avait des “chimistes” qui lavaient, conditionnaient ou confectionnent les pains de cocaïne. Il y avait encore des “transporteurs” et des “livreurs” qui amenaient la cocaïne en Allemagne, en Espagne, en Italie ou aux Pays-Bas principalement. Et, en bout de course, il y avait les “blanchisseurs” des gains générés par cette activité criminelle.
Jeudi, la procureure fédérale détaillera le rôle des 40 prévenus et les peines requises.