On mesure parfois mal, nous francophones, l'immense stupeur qui a saisi les Flamands en regardant ces dernières semaines la série documentaire Godvergeten ("les oubliés de Dieu"). Diffusée par la VRT, cette accumulation de témoignages bouleversants de victimes de prêtres pédophiles ne peut que choquer. Ils sont une vingtaine à se confier, parfois à rompre le silence qu'ils s'étaient infligé ou qui leur avait été imposé. Leurs paroles sont insoutenables et révèlent l'ampleur des blessures intimes qu'un abus peut provoquer dans une vie. Ils témoignent de faits d'une ignominie sans nom perpétrés par des "hommes" qui osent se revendiquer "de Dieu". C'est aussi une culture du silence et de l'omerta qui a régné au sein de l'Église.
Ella a pris des mesures importantes depuis 2012, certes. Mais une commission d'enquête parlementaire pour évaluer le suivi de ces mesures paraît absolument légitime. Une telle commission pourrait également favoriser l'avancement d'un processus de deuil collectif.
Il convient de ne pas balayer toute l'Église au vu de ces scandales. Ce serait injuste pour tous les bénévoles et prêtres qui n'ont absolument rien à se reprocher et qui consacrent leur vie et leur quotidien au service des autres de manière remarquable.
Pour autant, le désarroi et le mea culpa actuel des évêques démontrent qu'ils n'avaient pas pris la mesure des plaies encore ouvertes. Invitons-les à poursuivre deux réflexions fondamentales initiées par le pape François en personne. La première est générale, la seconde spécifique aux révélations qui se succèdent de par le monde. Comment, à l'avenir, pourront-ils être toujours plus proches du cœur battant de la société ? Quant à la lutte contre les abus, tant l'approche que les mentalités doivent évoluer. Il n'y a aucune solution miracle à espérer.
L'Église doit s'emparer des questions sur son avenir, sans attendre. En ce, le "synode" qui s'ouvre ce mercredi à Rome lui offrira l'occasion de poursuivre sa réforme interne, réévaluer sa culture hiérarchique, offrir plus de place aux femmes et aux laïcs et revoir l'accompagnement humain qu'elle offre aux siens. Les crimes sexuels et les silences qui les entourent sont favorisés par l'entre-soi. Voici dix ans que le pape appelle l'Église à ouvrir ses fenêtres. Pour les victimes, comme pour ceux qui œuvrent et croient en l'Église, il est temps.
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