La France expulse une figure de l’islamisme mondialisé
- Publié le 16-07-2018 à 20h12
- Mis à jour le 19-07-2018 à 12h16
Djamel Beghal, libéré ce lundi, a été renvoyé dans son pays natal à la suite d’un accord entre Paris et Alger. L’Algérien Djamel Beghal, l’une des figures de l’islamisme mondialisé, est arrivé lundi à Alger, après sa libération et son expulsion de France. Cet homme de 52 ans, déchu en 2007 de sa nationalité française (acquise par mariage), présente la particularité d’avoir été condamné par deux fois en France pour des projets liés au terrorisme. Beghal, qui est suivi depuis les années nonante par les autorités françaises, est connu pour ses idées extrémistes, proches des thèses d’Al Qaïda, et pour avoir été l’un des mentors de Chérif Kouachi et Amédy Coulibaly, respectivement tueurs de "Charlie Hebdo" et de l’Hyper Cacher en janvier 2015.
Sa libération suivie de son expulsion, ce lundi, est intervenue trois semaines avant la date prévue. Elle est le fruit d’un accord conclu au terme de plusieurs semaines de tractations entre la France et l’Algérie, son pays natal qu’il avait quitté à la fin des années 1980 pour s’installer en France. De prime abord, aucun des deux pays ne voulait accueillir cette personnalité islamiste qui a effectué dix-sept ans de réclusion dans l’Hexagone. Alger n’a finalement pu se soustraire à son accueil dès lors que sa nationalité algérienne fut confirmée, son avocat ayant fait valoir qu’un refus aurait fait de lui un apatride - un statut contraire au droit international.
Djamel Beghal était lui-même favorable à son expulsion. "Il y a dix ans, nous avions bloqué son expulsion vers l’Algérie en raison du risque de torture encouru. Le climat lui apparaît désormais plus apaisé", a expliqué à l’AFP son avocat Bérenger Tourné. Il sera néanmoins rejugé par la justice algérienne, qui l'avait condamné par contumace en 2003 à 20 ans de prison pour "appartenance à un groupe terroriste", a annoncé lundi soir l'agence de presse d'Etat algérienne APS, citant une "source proche du dossier".
"Londonistan" et Afghanistan
En mars 2005, il est condamné en France à dix ans de prison pour association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste, pour avoir projeté un attentat à la bombe contre l’ambassade des Etats-Unis à Paris. Un projet qu’il a reconnu dans des aveux qu’il finira par contester, prétextant que ceux-ci ont été obtenus sous la torture lors de sa détention aux Emirats arabes unis.
Il y avait été interpellé mi-2001, alors qu’il revenait d’Afghanistan, avant d’être extradé vers la France trois semaines après les attentats du 11-Septembre aux Etats-Unis. D’autres islamistes, liés à ce que l’on a appelé le "groupe Beghal", avaient été arrêtés, notamment en Belgique, à la suite de son interpellation.
C’est durant ce premier séjour en prison, à Fleury-Mérogis, que Chérif Kouachi et Amedy Coulibaly vont, dès 2006, bénéficier de son patronage religieux. Et lorsqu’il bénéficie d’une libération en 2009 pour être assigné à résidence dans le Cantal (Auvergne), ceux-ci lui rendront de multiples visites.
L’année suivante, il est de nouveau arrêté puis condamné en 2013 à dix ans de prison pour avoir planifié l’évasion de Smaïn Aït Ali Belkacem, un membre du Groupe islamique armé (GIA) condamné à la perpétuité pour la vague d’attentats islamistes de 1995 à Paris. C’est cette peine qu’il achevait de purger à la prison de Vezin-le-Coquet (Bretagne) lors de sa libération ce lundi.
Avant son séjour en Afghanistan en 2000, Djamel Beghal était installé à Londres, devenue capitale européenne de l’islamisme, ce qui valut à la capitale britannique le surnom de "Londonistan". C’est là qu’il se rapproche de la mouvance djihadiste. En France, où il s’était établi dix ans auparavant, il avait, dès le milieu des années nonante, suivi les enseignements d’un théologien suisse d’origine égyptienne, un certain Tariq Ramadan, petit-fils du fondateur des Frères musulmans.