La militante laïque Nadia Geerts rejoint le MR: "Je ne vois aucune volonté à gauche de rappeler l’attachement à la laïcité de l’État"
L’actualité récente (Stib, etc.) l’a convaincue de travailler pour le parti de Georges-Louis Bouchez.
- Publié le 18-06-2021 à 21h05
- Mis à jour le 19-06-2021 à 07h28
La militante laïque Nadia Geerts rejoint le Mouvement réformateur. Agrégée de philosophie, enseignante, auteure de plusieurs ouvrages sur la neutralité et la laïcité, elle va désormais travailler à mi-temps pour le centre Jean Gol (le centre d’études du MR). Elle sera chargée des questions liées à la neutralité ou encore aux libertés individuelles et sera amenée à représenter les libéraux francophones sur ces thèmes. Ce recrutement de choix a été annoncé vendredi après-midi lors d’une conférence de presse au siège du Mouvement réformateur, avenue de la Toison d’or à Bruxelles.
Les débats récents autour du respect de la neutralité de l’État ont convaincu cette intellectuelle classée à gauche de s’engager en faveur de la formation présidée par Georges-Louis Bouchez. C’est par l’entremise de Denis Ducarme, député fédéral en pointe sur les questions relatives à la laïcité, que cette arrivée qui peut sembler étonnante, a pu se réaliser.
La gauche est "angélique", "frileuse"…
"La neutralité de l’État est un garde-fou essentiel pour garantir l’égalité de traitement de chacun, a expliqué à la presse la nouvelle recrue du centre Jean Gol. Cette neutralité, elle ne se morcelle pas, elle est une et indivisible. Ces dernières semaines ont montré que cette exigence de neutralité était soumise à des coups de boutoir. Les partis dits de gauche font preuve d’une regrettable frilosité ou, pire, d’un mélange d’électoralisme et d’angélisme qui leur ont fait renoncer au fondement de la liberté. L’émancipation individuelle et le progrès social ne sont jamais passés par des compromissions vis-à-vis d’un quelconque cléricalisme."
Fort isolés dans leur combat en faveur d’une neutralité totale des services publics, les libéraux ont pu la séduire. "Il faut l’admettre : la résistance à cette offensive (contre la neutralité, NdlR) vient du MR. Je ne vois aucune volonté à gauche de rappeler l’attachement à la laïcité de l’État, qu’elle considère comme discriminante… Cette attitude est incongrue à mes yeux de progressiste, de féministe, de laïque. Les maigres acquis en matière de neutralité sont de plus en plus détricotés au nom d’un vivre ensemble qui promeut en réalité une ghettoïsation de la société sur un modèle anglo-saxon."
Le gouvernement bruxellois dans le viseur
Dans sa réflexion, Nadia Geerts s’était en particulier intéressée à la question du port du voile au regard du respect des valeurs laïques. Son jugement est particulièrement dur à l’égard de l’opposition du gouvernement bruxellois à un appel suite à la condamnation en justice de la Stib. La société bruxelloise de transport est jugée coupable de discrimination en raison du rejet des candidatures à un emploi d’une femme portant le foulard islamique. "L’honneur de la Stib aurait dû être porté haut par des partis démocratiques qui ont préféré se coucher devant une décision de justice complètement insensée."
Au fédéral, la désignation d’Ihsane Haouach, une femme voilée, comme commissaire du gouvernement auprès de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes l’a également heurtée. "Cette décision est un non-sens et contredit les principes de la gauche. Elle occupe clairement une fonction d’autorité et elle porte un signe convictionnel qui marque une différence dans le code vestimentaire des femmes. Dans ses nouvelles fonctions, sera-t-elle à même, demain, de rester neutre si, par exemple, la question du voile imposé aux petites filles devait être examinée par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes ?"