Les énigmes de Mohamed Abrini, l’homme au chapeau
- Publié le 19-04-2019 à 19h52
- Mis à jour le 27-01-2020 à 10h03
Il voudrait faire croire qu’il est entré très tard dans la cellule d’Abaaoud. Pourtant, il paraît impliqué dès juin 2015.Il est, avec Osama Krayem - qui a renoncé au dernier moment à se faire exploser dans le métro de Bruxelles le 22 mars 2016 - le deuxième terroriste à avoir fait demi-tour au lieu de se faire exploser et tuer des innocents dans son sillage.
Mohamed Abrini, "l’homme au chapeau" que l’on a vu à Zaventem pousser un caddy avec une valise bourrée d’explosifs, a été capturé vivant, un mois après les attentats de Bruxelles.
L’arrière-cour de la maison de ses parents à Molenbeek communiquait avec celle de Abdeslam qui, lui aussi, n’avait pas déclenché les explosifs qu’il portait. C’était le 13 novembre 2015 à Paris.
Ami et voisin des Abaaoud et des Abdeslam
Mais contrairement à celui qu’il a appelé dans une audition "un ami d’enfance et voisin depuis toujours", Mohamed Abrini ne s’est pas muré dans le silence. Les enquêteurs belges l’ont longuement interrogé. Et Mohamed Abrini le sait : il n’est pas près de sortir de prison. "À Paris il y a neuf chefs d’inculpation contre moi et déjà un c’est la perpétuité."
Il dit avoir "rencontré des difficultés aux prisons de Bruges et Beveren, on a craché sur mon tapis de prière. On a versé du liquide sur le Coran or ce n’était même pas mon livre à moi".
Il garde des zones d’ombre. Qui est-il ? Est-il une pièce importante depuis le début de la cellule dirigée par Abdel Hamid Abaaoud qui frappera à Paris le 13 novembre 2015 ? Ou n’est-il, comme il a tenté de le faire croire, qu’un électron qui aurait été embarqué, sans être véritablement au courant, dans les projets de cet autre ami, Abdel Hamid Abaaoud, dont il a dit : "je le connais depuis mes 18 ans" et "je ne sais pas pourquoi il a viré comme cela" ?
La première hypothèse est largement étayée. Il a évidemment, comme Salah Abdeslam, suivi de très près les derniers préparatifs des attentats de Paris.
Embarqué dans le "convoi de la mort"
Abrini a, comme les frères El Bakraoui, franchi allégrement le gué qui sépare le territoire du banditisme pour gagner le monde des terroristes.
Le 12 novembre 2015, il faisait partie de ce qu’il a appelé "le convoi de la mort", les trois voitures qui, de Charleroi, ont pris la direction de Paris.
Difficile d’imaginer qu’il les ait accompagnés pour ce trajet s’il n’était pas un tout proche. Ce n’était d’ailleurs pas la première fois qu’il se rendait dans la capitale française avec les frères Abdeslam. Il y avait été les 10 et 11 novembre pour louer les chambres où les terroristes qui frapperont passeront la nuit du 12 au 13.
Aux enquêteurs, il dira qu’il n’a eu que très tard une vague idée de ce qui allait se passer. "J’avais compris que ça allait chauffer à Paris. Je l’ai compris deux, trois jours avant. Mais ce qui allait se passer exactement, je ne savais pas. Quand ? Comment ? Je ne savais pas."
L’entrée précoce de Mohamed Abrini dans la cellule est accréditée par son voyage qu’il effectuera en Turquie et en Syrie, avant un retour par Londres et Paris, entre le 23 juin 2015 et le 18 juillet 2015.