La critique ciné de la semaine: Bécassine, ce n’est pas notre copine
Une adaptation d’une insupportable naïveté pour une antihéroïne ringarde.
- Publié le 19-06-2018 à 18h41
- Mis à jour le 20-06-2018 à 07h03
Une adaptation d’une insupportable naïveté pour une antihéroïne ringarde.Les héros ne meurent peut-être jamais, mais ils ne vieillissent pas nécessairement très bien. Les Pieds Nickelés, superstars françaises de papier jusqu’aux années 50, n’existent plus aujourd’hui que dans les expressions un peu désuètes des grands-parents. Bécassine, autre phénomène du début des années 1900, ne s’en est guère mieux sortie. Sans une chanson de Chantal Goyal, la petite Bretonne de vert vêtue se morfondrait plus que probablement dans les oubliettes de la BD.
Et cela ne doit rien au hasard. La démarche lourde, d’une naïveté qui n’a d’égale que sa serviabilité, brave mais peu futée, Bécassine entretient le stéréotype vieillot et peu flatteur du sexe prétendument faible, très loin de la réalité de la femme moderne, indépendante et vive d’esprit. Autant dire que, déjà, au moment de la révolution sexuelle, elle incarnait à elle seule la ringardise.
Notre avis Aujourd’hui, Bruno Podalydès tente de casser cette image en tentant de donner du charme à sa dévotion aux autres. Sans y parvenir une seule seconde. Tout sonne faux et sent la naphtaline dans cette comédie poussive, qui avance avec de gros sabots et dont les gags sont tellement éculés qu’on a du mal à imaginer qu’ils aient pu amuser qui que ce soit voici un siècle.
Karin Viard en marquise écervelée, Josiane Balasko en femme de ménage râleuse, Michel Vuillermoz en oncle la main sur le cœur, Denis Podalydès en amoureux transi ou la formidable Isabelle Candelier en cuisinière très sociable tentent vainement de sauver les meubles, mais se vautrent trop souvent dans le grotesque pour réussir cet exploit.
À l’instar de son personnage de marionnettiste escroc, Bruno Podalydès a tourné son film comme s’il s’agissait d’une pièce de Guignol, avec beaucoup d’outrances, de clichés et de gags inspirés par le cinéma muet. Cela fera peut-être parfois rire les tout-petits, mais ce n’est pas sûr. Au-delà de trois ans, par contre, le calvaire est assuré.
Signalons qu’en Bretagne, une pétition a été lancée, appelant au boycott du film car, "Bécassine représente toujours aujourd’hui un symbole qui véhicule un message dégradant, insultant et méprisant envers les femmes de Bretagne."
C’est sûr, Bécassine, ce n’est pas notre copine.
Notre avis: BOF
Gueule d’ange: dans le quart-monde avec Marion Cotillard
Notre avis Coupe du Monde oblige, puisque la plupart des films risquent de boire le bouillon pendant que les supporters éclusent des bières, les distributeurs de cinéma en profitent pour se débarrasser de leurs fonds de tiroir et montrer leurs œuvres destinées avant tout à quelques cinéphiles pointus. Une catégorie à laquelle émarge Gueule d’ange. Soit l’histoire d’une fille de 8 ans,
Elli, en admiration béate devant sa maman, Marlène. Pourtant, elle lui en fait voir de toutes les couleurs. Le soir même de son nouveau mariage, Marlène s’envoie en l’air avec un serveur. Le lendemain, elle s’excite devant les programmes de télé-réalité, avant de sortir avec ses copines en boîte de nuit et de rencontrer d’autres hommes.
Quitte à laisser sa fille toute seule à l’appartement. Alors, Elli brosse les cours, boit de l’alcool comme sa maman, en donne à ses poupées, se maquille outrancièrement, vole pour manger. Et se raccroche au fils du voisin comme si c’était le papa qu’elle n’a jamais connu. Le sujet est dur. La première scène, interminable, est atroce, à la limite du supportable. Marlène, complètement ivre, se lance dans un discours gênant, chante Fallait pas commencer de Lio en l’honneur de son époux, le traite de "connard", se donne lamentablement en spectacle. Là, l’envie de quitter la salle frôle la démangeaison…
La suite de Gueule d’ange tient du catalogue de tous les cauchemars qu’on voudrait éviter à ses enfants. Livrée à elle-même, rejetée par les autres élèves parce qu’elle "pue l’alcool", Elli perd tout attrait pour l’existence.
Dans ce contexte incroyablement déprimant, seule la performance de Marion Cotillard, épatante dans un contre-emploi de "bombasse" du quart-monde, remonte un peu le moral. Il faut donc avoir le cœur bien accroché et la motivation au zénith pour se lancer dans cette plongée au cœur de la détresse et de la bêtise humaine. Dont on ressort meurtri mais pas touché, tant l’enchaînement misérabiliste paraît beaucoup trop lourd.
Notre avis : BOF
Une prière avant l’aube: juste de la baston
Notre avis Quand il ne se shoote pas, un Anglais cogne en participant à des combats clandestins de Bangkok. Un jour, la police le jette en prison. Seul Blanc parmi les locaux, il a du mal à s’entendre avec ses 59 colocs dans leurs 40 m2. Alors, il cogne et il se shoote quand il en a l’occasion. Un gardien lui procure régulièrement une petite dose pour casser du musulman. Notre Billy remplit son contrat avec une conscience professionnelle excessive. Un jour, il trouve la salle de boxe et rapidement, c’est lui qui représente les couleurs - le beurre noir ? - de sa prison au championnat inter-taules. Ce n’est plus Billy, c’est carrément Rocky. D’ailleurs, il se fait tatouer non seulement l’eye mais tout le tiger dans le dos. Que reste-t-il d’humain dans ce pitbull ? C’est la question à laquelle ce film de Jean-Stéphane Sauvaire ne répond pas, c’est l’adrénaline qui l’intéresse.
Certes, quand on montre autant de complaisance à l’égard de la violence, autant de jouissance masochiste à filmer un viol, autant de tension érotique à caresser un torse tout en tablette de chocolat, autant d’excitation à filmer des combats d’hommes comme si c’étaient des chiens, on se doit d’ajouter un petit couplet sur la rédemption, au cas où tout le monde ne serait pas "aware"que le kickboxing conduit tout droit à la sagesse cosmique.
Regardez Jean-Claude Van Damme. À moins d’être passionné par les tatouages Une prière avant l’aube n’apporte rien au film de boxe ou de prison, c’est juste de la baston.
Notre avis : NUL