La grosse artillerie contre l'insécurité
Police-justice: c'était les deux grands thèmes des présidentielles et des législatives. Après les promesses, la chiraquie passe aux actes. Ce mercredi, le Conseil des ministres adoptera un projet de loi sur la justice durcissant notamment la répression de la délinquance juvénile. Ce même jour, l'Assemblée nationale approuvera un autre texte fondateur de l'ère Chirac II: le projet de loi sur la sécurité du ministre de l'Intérieur Sarkozy, dont la discussion a débuté mardi. Le n°2 du gouvernement Raffarin entend ni plus ni moins `redonner confiance aux Français´.
- Publié le 15-07-2002 à 00h00
CORRESPONDANT PERMANENT À PARIS
Police-justice: c'était les deux grands thèmes des présidentielles et des législatives. Après les promesses, la chiraquie passe aux actes. Ce mercredi, le Conseil des ministres adoptera un projet de loi sur la justice durcissant notamment la répression de la délinquance juvénile. Ce même jour, l'Assemblée nationale approuvera un autre texte fondateur de l'ère Chirac II: le projet de loi sur la sécurité du ministre de l'Intérieur Sarkozy, dont la discussion a débuté mardi. Le n°2 du gouvernement Raffarin entend ni plus ni moins `redonner confiance aux Français´. Comment? En tenant compte `de la désespérance de cinq millions de Français qui ont choisi le vote extrême´ et en faisant en sorte que `pas un seul centimètre carré de la République ne puisse être considéré comme une zone de non-droit´.
Concrètement, 13500 emplois supplémentaires seront créés dans les forces de l'ordre - alors que la France se distingue déjà dans le paysage européen par ses effectifs policiers pléthoriques. La sécurité intérieure se verra octroyer un budget-record de 5,6 milliards d'euros pour la période 2003-2007, sans compter une hausse de 25 pc des crédits d'équipement et de fonctionnement. Cette hausse permettra notamment de doubler le rythme de rénovation et de construction des casernes et commissariats, et de doter les forces de l'ordre opérant en zones sensibles des fusils `flash-balls´: ces armes controversées tirant des balles de caoutchouc de gros calibre.
Deux grandes nouveautés encore: un rapprochement historique entre gendarmerie et police nationale, mises toutes deux sous la tutelle du ministère de l'Intérieur, et la création, comme dans l'armée et la gendarmerie, d'un corps de réservistes au sein de la police, qui permettra le rappel des policiers retraités en cas `d'événements graves et exceptionnels ou de situations de crise´.
Enfin, le plan Sarkozy cible une série de groupes bien particuliers (gens du voyage, adeptes des `rave-parties´, mendiants dits `agressifs´, jeunes créant des attroupements aux pieds d'immeubles, etc.). A l'automne, il sera complété par de nouvelles dispositions visant à mieux réprimer le vol de voitures et de téléphones portables ainsi que la prostitution lorsqu'elle est pratiquée par des étrangers.
`Des dérives policières´
Ce projet doit être relativisé. Les créations de postes annoncées ne seront effectives que dans un an ou deux et, en attendant, les 2000 emplois nouveaux que l'on verra sur le terrain auront été embauchés... par le gouvernement Jospin. Et c'est cette même équipe qui a commandé et payé les premiers `flash-balls´ que Sarkozy vient de déployer à grand renfort de publicité dans les banlieues.
La droite n'en approuve pas moins avec enthousiasme ce dispositif, qui ravit d'aise les syndicats policiers également. La gauche, elle, si elle souscrit au renforcement des effectifs, s'indigne de la philosophie du texte: `le tout-sécuritaire, le tout-répressif, qui stigmatise les gens, les jeunes et les quartiers´.
`Si réduire l'insécurité se résumait à une affaire de police et de justice, ce serait fait depuis longtemps´, grogne l'ex-ministre socialiste de l'Intérieur Daniel Vaillant. Mais Sarkozy a beau jeu de lui renvoyer `la naïveté´ et le mauvais bilan de Jospin en la matière. Et le premier flic de France a d'autant moins d'états d'âme que, selon lui, `la répression est la meilleure des préventions´, comme l'illustre à ses yeux la diminution de l'insécurité enregistrée depuis la victoire de la droite.
Aux associations de défense des droits de l'homme qui s'inquiètent de la multiplication, sur le terrain, des contrôles abusifs et des `dérives policières´ commis par des forces de l'ordre galvanisées, Sarkozy assure ne `pas céder aux thèses de l'extrémisme´. L'impunité zéro, promet-il, s'appliquera autant aux policiers indignes qu'aux truands et aux voyous.
© La Libre Belgique 2002