L'art de réparer les valves cardiaques malades, plutôt que de les remplacer
Souvent préconisée, la réparation valvulaire présente de nombreux avantages.Pionnière dans ce domaine, l'UCL a organisé des journées de chirurgie reconstructrice.
- Publié le 03-06-2002 à 00h00
En plein règne d'or du jetable, les démarches consistant à réparer plutôt qu'à remplacer peuvent paraître presque saugrenues. Telle est pourtant l'option privilégiée depuis quelque temps en matière de maladie cardiaque valvulaire, une pathologie qui touche de plus en plus de jeunes adultes depuis la disparition de la fièvre rhumatismale, jusqu'alors considérée comme principale cause de maladie valvulaire dans les pays occidentaux.
Il faut dire que le remplacement, ultime solution offerte aux patients il y a une trentaine d'années pour éviter l'issue fatale, n'était pas forcément la panacée. Le fait de réséquer entièrement la valve malade pour la remplacer par une prothèse artificielle entraînait bien souvent des risques d'embolie ou de thrombose cérébrale, d'hémorragie ou de réopération pour dégénérescence de la valve.
En revanche, utilisant les propres tissus du patient, la réparation allait permettre de reproduire presque exactement la situation initialement créée par la nature. Le fait de ne pas devoir recourir en l'espèce aux médicaments anticoagulants, d'éviter les embolies cérébrales ou encore de conserver une meilleure force contractile du muscle cardiaque constituait les principaux avantages -non négligeables- de cette méthode.
L'alternative allait donc assez naturellement s'imposer, à mesure que les connaissances s'affinaient. En effet, grâce à l'échographie cardiaque notamment, cardiologues et chirurgiens ont pu visualiser les structures intracardiaques et comparer le fonctionnement chez le sujet sain et malade. C'est cette meilleure connaissance des mystères de la maladie qui a conduit certains chirurgiens à investiguer dans cette voie.
Parmi ceux-ci, le service de chirurgie cardio-vasculaire et thoracique des Cliniques universitaires Saint-Luc a joué un rôle déterminant dans ce domaine en Europe. Ainsi l'équipe a organisé le week-end dernier des journées de chirurgie reconstructrice aortique et mitrale. Ce fut l'occasion de réunir le gratin des chirurgiens pionniers dans diverses branches de la réparation valvulaire en cas d'insuffisance. Deux journées durant, les interventions réalisées sur huit patients (deux réparations mitrales et six aortiques) ont été retransmises en direct dans une salle de congrès, afin d'être discutées dans le détail. Mais aussi d'initier les spécialistes à ces nouvelles et prometteuses techniques de pointe.
L'élaboration de ces différentes techniques de réparation valvulaire mitrale ne s'est toutefois pas faite en un jour.
L'aortique plus complexe
`Si la réparation valvulaire mitrale est maintenant utilisée dans la plupart des centres en Europe, explique le Pr Philippe Noirhomme, chef du service de chirurgie cardiovasculaire et thoracique des Cliniques universitaires Saint-Luc, la réparation de la valve aortique -nettement plus complexe de par son architecture- n'en est qu'à ses prémices. Depuis 1990, les Cliniques St-Luc ont réalisé plus de 215 interventions de réparation valvulaire aortique. L'adjonction de techniques plus poussées et plus complexes à l'arsenal des interventions valvulaires mitrales classiquement utilisées nous permet aujourd'hui de réparer 84pc de l'ensemble des valves mitrales opérées´.`Notre équipe est en train d'élaborer une classification du mécanisme de l'insuffisance aortique accompagné des techniques chirurgicales spécifiques adaptées à chaque cas opératoire, afin de proposer un traitement à la carte´, nous explique encore le Pr Gébrine El Khoury, qui a développé cette technique aux Cliniques Saint-Luc qui, au niveau aortique, réalisent aujourd'hui un tiers de réparations pour deux tiers de remplacements.
© La Libre Belgique 2002