Indemniser les aléas de la médecine
La semaine prochaine, le Comité ministériel restreint devrait - enfin - approuver un projet de loi visant à indemniser `les dommages liés aux soins de santé´. L'arc-en-ciel bouclera ainsi l'un de ses plus beaux chantiers. Un chantier très attendu par les malades victimes d'un `aléa médical´ qui doivent aujourd'hui passer obligatoirement devant un tribunal pour être indemnisés - cela prend du temps et c'est aléatoire parce qu'il faut prouver la faute du personnel soignant. Un chantier qui est aussi très attendu par les médecins, lesquels, tétanisés par la perspective d'un procès, multiplient inutilement les examens
- Publié le 29-05-2002 à 00h00
La semaine prochaine, le Comité ministériel restreint devrait - enfin - approuver un projet de loi visant à indemniser `les dommages liés aux soins de santé´. L'arc-en-ciel bouclera ainsi l'un de ses plus beaux chantiers. Un chantier très attendu par les malades victimes d'un `aléa médical´ qui doivent aujourd'hui passer obligatoirement devant un tribunal pour être indemnisés - cela prend du temps et c'est aléatoire parce qu'il faut prouver la faute du personnel soignant. Un chantier qui est aussi très attendu par les médecins, lesquels, tétanisés par la perspective d'un procès, multiplient inutilement les examens.
Le ministre de l'Economie Charles Picqué (PS) a rédigé un avant-projet de loi. Une note reprenant les grands principes du mécanisme circule dans les cénacles gouvernementaux. `La Libre´ a pu y jeter un oeil.
Plus de faute, un fait
La grande idée du projet, c'est de prévoir une indemnisation pour tous les dommages médicaux, quelles qu'en soient les causes. Il ne faudra donc plus prouver la faute d'un médecin avant d'être indemnisé; a fortiori, il ne faudra plus non plus passer devant un tribunal, ce qui raccourcira dès lors fameusement les délais d'indemnisation.
Concrètement, un patient qui estime avoir subi un préjudice à la suite d'une intervention médicale pourra introduire un dossier auprès d'une commission qui sera présidée par un magistrat et composée d'usagers de soins de santé, de prestataires et de compagnies d'assurance. Cette commission déterminera d'abord s'il y a bien un lien de causalité entre le dommage subi et l'acte de soins. Pour cela, elle pourra avoir accès au dossier médical du plaignant, faire appel à des experts, etc.
Une fois le lien de causalité établi, la commission fixera le montant de l'indemnisation. Si le patient accepte la proposition, il perdra alors la possibilité de réclamer des dommages et intérêts en justice. Son droit de porter plainte devant un tribunal pénal par contre est maintenu.
Le patient et/ou sa compagnie d'assurance pourront par ailleurs contester le montant de l'indemnité fixé par la commission. Où? Devant le tribunal de première instance.
Un fonds de solidarité
La couverture du `risque médical´ sera assurée en deux temps. En première ligne, on retrouvera les assurances privées. Tous les prestataires de soins - médecins, kinésithérapeutes, hôpitaux, etc.- devront obligatoirement souscrire une assurance en `responsabilité objective´. La prime que chacune de ces catégories de personnes payera dépendra forcément, comme c'est le cas pour toute assurance, du risque médical qu'elles prennent. Il en coûtera ainsi moins cher à un généraliste qu'à un chirurgien.
Mais ce n'est pas tout. L'avant-projet de loi prévoit, en deuxième ligne, l'intervention éventuelle d'un fonds de solidarité. Ce fonds de solidarité sera actionné si le médecin n'est pas en ordre d'assurance. Il couvrira également, le cas échéant, la différence entre le plafond prévu par l'assurance privée du médecin et le montant de l'indemnisation tel qu'il a été établi par la commission. ` Ainsi, dit-on au cabinet Picqué, les dommages seront intégralement couverts. C'est l'objectif.´
Toute la question est cependant de savoir comment ce fonds sera alimenté. Dans la note ministérielle, il est question de le financer par une cotisation solidaire prélevée auprès du corps médical, éventuellement modulée suivant le caractère social des prestations et des efforts de prévention des risques entrepris par les équipes médicales. Mais cela reste très lourdement en discussion.
© La Libre Belgique 2002