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Consommateurs, marques ou vendeurs: à qui profite vraiment le cashback?

Conditions trop strictes, incitation à la surconsommation… La réduction sous forme de bon est appréciable mais pas sans inconvénients.

Décodage - Journaliste au pôle Société Temps de lecture: 5 min

Téléviseurs, frigo, machine à laver… de nombreux produits électroniques et électroménagers font aujourd’hui l’objet de cashback. Cette opération de marketing sous forme de bon consiste pour les marques à accorder au consommateur un remboursement substantiel après l’achat d’un article. Pour toucher le montant du cashback, le client doit se manifester auprès du constructeur avant une date butoir et suivre à la lettre une procédure bien balisée. La pratique semble avoir le vent en poupe en Belgique, terre promise du bon de réduction. « Ces deux à trois dernières années, nous observons une augmentation de ce type de promotion. Rien qu’entre 2016 et 2017, nous avons traité 11 % d’opérations de cashback en plus et les montants remboursés ont augmenté de 17 %, » indique David Vigneron, CEO de Highco Data Benelux. Cette entreprise, qui revendique 70 % du marché de la gestion des bons de réduction en Belgique et au Luxembourg, prend annuellement en charge 800 opérations de cashback auxquels participent 1,3 million de consommateurs pour 11 à 12 millions d’euros remboursés au total.« Nous ne rencontrons qu’une dizaine de problèmes par an ».

Magnifique ? Ce n’est pas l’avis de Test Achats. L’association de défense de consommateurs vient de régler un litige entre près de 200 candidats à une opération de cashback pour un smartphone et son constructeur, Samsung. Elle en profite pour dénoncer les failles et les vices d’un système auquel elle préfère la réduction immédiate à la caisse. En filigrane ressort cette question : à qui profite vraiment le cashback ?

1 Les consommateurs gagnants… mais sous conditions.« Bénéficier d’une réduction, cela fait du bien. Mais la médaille a son revers pour les consommateurs, prévient Julie Frère, porte-parole de Test Achats. Ils doivent communiquer leurs données privées que les fabricants vont utiliser. » L’association conseille de vérifier à quelles fins précises vont servir ces informations.

Autre écueil, soulève Test Achats : des consommateurs étourdis laissent passer le délai… et perdent donc leur réduction.« Nous souhaitons plus de transparence dans la communication sur nos cashbacks dans les points de vente, » réplique Isabelle Roels, porte-parole de Samsung. Celle-ci répond à une autre critique du système : la lourdeur de la procédure qui peut comporter plus d’une dizaine d’étapes, dont la découpe du code-barres du produit, ce qui est source d’erreur et de non-remboursement. « Nous sommes conscients que ce n’est pas idéal. Nous étudions des solutions d’amélioration.  » Pour David Vigneron, la solution est toute trouvée : la digitalisation. « Avec un formulaire en ligne, il suffit de trois minutes pour remplir sa demande de cashback, assure le patron de Highco Data Benelux. De plus, cela évite des erreurs d’encodage, comme un compte bancaire avec un chiffre manquant. »

Reste cette question de principe selon Test Achats : le cashback inciterait les consommateurs à céder trop facilement aux sirènes de l’achat. «  Le cashback est avantageux pour les gens consciencieux qui comparent et réfléchissent avant d’acheter, développe Julie Frère. Mais nous mettons en garde ceux qui ne seraient pas passés à la caisse sans cette promesse de réduction. Ils risquent de regretter leur achat. Notre conseil : demandez-vous si vous avez réellement besoin de remplacer votre appareil. » Chez Samsung, on se défend de pousser à la surconsommation. « Nos opérations de cashback sur nos smartphones visent les personnes équipées d’un modèle vieux de trois ou quatre ans, pas celles qui ont le modèle de l’année dernière, assure Isabelle Roels. Nos formations pour vendeurs vont dans ce sens. »

2 Les marques enrichies en données. Si les fabricants préfèrent le cashback à la réduction directe à la caisse, c’est parce qu’il leur permet de récolter de l’or : les données personnelles des clients. Avec celles-ci, ils peuvent mener des campagnes de marketing affûtées pour vendre d’autres produits et accessoires. Pour les marques, c’est un formidable outil de consolidation et de fidélisation. Samsung le reconnaît, lui qui mène ne moyenne 32 actions de ce type par an, avec un nombre de participants sans cesse en augmentation (90.000 en 2015, 98.000 en 2016, 110.000 en 2017, soit une hausse de 22 % rien qu’en deux ans). « Récolter les données de nos clients nous permet de communiquer en direct avec eux, de mieux les connaître et de les rendre plus enthousiastes pour nos produits et notre écosystème, » explique Isabelle Roels. Vous avez acheté le dernier modèle de smartphone avec cashback ? On vous parie que le fabricant vous enverra de la publicité ciblée pour des accessoires…

3 Les vendeurs profitent d’un levier relatif. De prime abord, on pourrait penser que le cashback, pris en charge par les fabricants, est une aubaine pour les commerçants. La promesse d’une réduction est effectivement un argument de vente massue. « D’ailleurs, la distribution pousse les marques à multiplier les opérations de cashbacks, observe David Vigneron. Cela devient même un élément de négociation dans la mise en valeur des produits dans les folders publicitaires des enseignes.  » Encore faut-il qu’au bout du compte, le client soit content… « Quand la procédure de cashback échoue, c’est vers nous qu’il se retourne, même si c’est une initiative de la marque, constate Janick De Saedeleer, porte-parole de Media Markt. C’est pour cela que nous préférerions faciliter le système en jouant l’interface entre le client et la marque et en accordant tout de suite la réduction à la caisse.  » Le consommateur apprécierait certainement. Mais pas sûr que le fabricant accepterait de dénaturer son précieux cashback.

 

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1 Commentaire

  • Posté par Lemaire Paul, vendredi 27 avril 2018, 8:40

    Et comment est gérée la TVA avec ces "Cashbacks"

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