Le Likoud de Netanyahou menacé de l’intérieur
- Publié le 19-11-2017 à 19h31
- Mis à jour le 19-11-2017 à 19h34
Un groupe d’adhérents critiquent l’évolution du parti de droite dirigé par le Premier ministre.
L'ennemi est partout, même dans son propre camp. Interrogé une sixième fois par la police dimanche (et la deuxième fois ce mois-ci), le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, continue de nier en bloc les allégations de corruption émises contre lui. Il dénonce violemment ceux qui pourraient le critiquer, surtout si ces derniers viennent de son parti. Les “Nouveaux Likoudniks”, qui contestent sa mainmise sur le Likoud, depuis son arrivée au pouvoir en 2009, sont donc devenus une de ses cibles privilégiées.
Formé il y a six ans, le groupe des Nouveaux Likoudniks fait parler de lui depuis le début de l’année 2017. Il s’est aussi fait remarquer cet été, lors des manifestations hebdomadaires organisées à Petah Tikva, au nord-est de Tel Aviv, devant la maison du procureur général. Depuis un an, des milliers d’Israéliens s’y rendent chaque samedi soir pour réclamer l’inculpation de M. Netanyahou pour deux affaires de corruption.
Restaurer les valeurs fondatrices En août, certains responsables du Likoud se sont inquiétés de la présence de ces “nouveaux” Likoudniks parmi les manifestants, et donc de leur action au sein du parti. “Ils veulent opérer de l’intérieur et causer la chute du gouvernement. Ils appartiennent au Meretz (parti d’opposition, à gauche, Ndlr) et au parti travailliste. Il faut les expulser du Likoud”, avait alors déclaré Nava Boker, députée Likoud et vice-présidente de la Knesset (le Parlement israélien).
Interrogé par la presse israélienne, Lior Meiri, l’un des fondateurs du groupe, avait alors récusé ces accusations : au contraire, ses adhérents veulent “restaurer les valeurs fondatrices du Likoud” en proposant “un modèle de société et d’intégrité qui garantit l’Etat de droit”.
Depuis sa création en 1973, le Likoud “oscille entre deux tendances”, explique Ofer Kenig, chercheur en sciences politiques à l’Institut israélien pour la démocratie. L’une liée à “la droite traditionnelle nationaliste” et l’autre tournée vers “l’économie libérale”. Aujourd’hui, la première a pris le dessus sur la seconde, observe-t-il.
Représenter la classe moyenne La contestation à l’intérieur du Likoud s’est cristallisée après le mouvement de protestations de l’été 2011 en Israël. Des centaines de milliers d’Israéliens étaient alors descendus dans la rue, exigeant de la part du gouvernement plus de justice sociale.
Les Nouveaux Likoudniks entendent donc représenter la classe moyenne israélienne, “la majorité silencieuse, dont la voix n’a pas été entendue depuis des années”, lit-on sur leur site internet. “Il ne s’agit pas de jeunes activistes ou d’étudiants”, assure, sous couvert d’anonymat, une source qui connaît bien le phénomène. “Ce sont des gens qui travaillent et ont des enfants : ils sont confrontés à la réalité de la vie en Israël. Leur motivation est d’abord économique : ils aspirent à une plus juste répartition du fardeau national”.
Depuis leur début, les Nouveaux Likoudniks récusent la politique du Premier ministre et son récent revirement à droite. Parce qu’ils appartiennent au Likoud, ils sont donc perçus comme des “traîtres” par certains membres du parti au gouvernement, analyse Ofer Kenig : “Toute critique à l’égard de M. Netanyahou équivaut désormais à une remise en cause du parti”.
Des expulsions entamées Le projet des rebelles du Likoud fait néanmoins son chemin. Après de timides débuts, les adhésions aux Nouveaux Likoudniks ont augmenté dès la fin 2016, passant de 3 000 à plus de 12 000 membres – sur un total d’environ 100 000 membres au Likoud.
Or, plus ils seront nombreux, plus ils pourront influencer la composition du Likoud à la Knesset, par l’intermédiaire du vote des primaires qui précède les élections législatives. “C’est la seule manière pour les électeurs d’avoir un véritable pouvoir démocratique”, ajoute notre source anonyme. “Les inscriptions récentes en masse au Likoud font donc peur aux actuels députés et ministres du parti”.
Pour contrer le phénomène, le Likoud a d’ailleurs bloqué, depuis mi-août, ses inscriptions en ligne et une procédure d’expulsion de certains Nouveaux Likoudniks a été entamée.