Naufrage en Méditerranée : Berlin appelle l'Europe à lutter contre les passeurs "criminels"

Le naufrage d'un chalutier chargé de migrants au large de la Libye ce weekend fait redouter la "pire tragédie" de ce type en Méditerranée, avec quelque 700 présumés disparus, et accentue encore la pression sur l'Europe, sommée d'agir. L'Union européenne envisage un sommet extraordinaire.

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Naufrage en Méditerranée : Berlin appelle l'Europe à lutter contre les passeurs "criminels"
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Plusieurs ministres allemands, dont le vice-chancelier Sigmar Gabriel, ont appelé dimanche à une lutte au niveau européen contre les passeurs "criminels", après le nouveau naufrage d'un bateau de migrants en Méditerranée qui aurait fait près de 700 morts.

"Toutes les polices d'Europe et les autorités chargées de surveiller les frontières doivent mobiliser l'ensemble de leurs forces pour lutter contre les bandes de passeurs criminelles qui font des affaires avec la misère humaine", a déclaré M. Gabriel, par ailleurs ministre social-démocrate de l'Economie.

Evoquant des "nouvelles bouleversantes", il a jugé nécessaire "une intervention internationale contre" ces bandes, alors que l'Union européenne a d'ores et déjà annoncé la tenue d'une réunion des ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères pour prendre des mesures après ce nouveau drame.

De son côté, le ministre de l'Intérieur, le conservateur Thomas de Maizières, a lui aussi dénoncé dans un communiqué "les passeurs criminels" qui "gagnent beaucoup d'argent" en "surchargeant des bateaux" et "en laissant les gens à leur propre sort".

"Des crimes aussi horribles exigent un réponse européenne", a-t-il insisté, estimant que "nous ne devons plus tolérer que ces criminels sacrifient massivement des vies humaines par pure rapacité".

Déplorant une "nouvelle tragédie", le ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a quant à lui souligné la nécessité "d'apporter plus de stabilité à la Libye", dont beaucoup de réfugiés sont issus.

"Nous devons également mettre fin aux agissements des passeurs. Ca ne pourra se faire que dans le cadre d'une coopération internationale", a-t-il déclaré à la chaîne de télévision publique allemande ARD.

L'Union européenne envisage un sommet extraordinaire

Face à ce nouveau drame, l'Union européenne envisage prochainement un sommet extraordinaire, a indiqué dimanche le président du Conseil européen, Donald Tusk. "Je vais poursuivre les discussions avec les dirigeants européens, la Commission et le service diplomatique de l'UE sur la façon de remédier à la situation", a indiqué sur son compte Twitter M. Tusk. Il prendra "une décision sur la possible tenue d'un sommet extraordinaire, après ces consultations", a précisé son porte-parole à l'AFP.

Le Premier ministre italien Matteo Renzi avait réclamé un tel sommet européen d'urgence, de préférence avant la fin de la semaine prochaine alors qu'une réunion d'urgence entre ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères de l'UE doit avoir lieu dans les prochains jours à une date non encore fixée.

La Commission européenne, qui prépare une nouvelle stratégie sur l'immigration qui doit être adoptée mi-mai, a souligné que "des vies humaines sont en jeu, et l'Union européenne dans son ensemble a l'obligation morale et humanitaire d'agir".

"Tant que les pays d'origine et les pays de transit ne prendront pas des mesures pour éviter ces traversées désespérées, des gens continueront à mettre leur vie en péril. Une grande partie de notre approche est de travailler avec les pays tiers", a insisté l'exécutif européen.

Ainsi la chef de la diplomatie de l'UE, l'Italienne Federica Mogherini, a annoncé que la question sera à l'agenda de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE lundi à Luxembourg. "Je vais présenter une série de propositions concernant la Libye, une des principales routes du trafic illégal de migrants", a-t-elle indiqué.

Les chefs de la diplomatie des 28 doivent notamment discuter de l'assistance éventuelle de l'UE à un gouvernement d'unité nationale actuellement en pourparlers en Libye, seule garantie à leurs yeux de stabilité et de réconciliation politique, et seul moyen d'endiguer le flot de migrants alors que les passeurs profitent du chaos ambiant.

Le Premier ministre espagnol, Mariano Rajoy, a de son côté averti qu'il en va de la "crédibilité" de l'Europe. "Nous Européens, nous risquons notre crédibilité si nous ne sommes pas capables d'éviter ces situations dramatiques qui se produisent tous les jours", a-t-il souligné.

Berlin et Paris ont appelé à intensifier la lutte contre les passeurs. "Toutes les polices d'Europe et les autorités chargées de surveiller les frontières doivent mobiliser l'ensemble de leurs forces pour lutter contre les bandes de passeurs criminelles qui font des affaires avec la misère humaine", a déclaré le vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel.

Le président français François Hollande a exhorté les pays de l'UE à agir en renforçant "le nombre de bateaux" de surveillance et en proposant "plus de survols" aériens en Méditerranée.

En revanche, le Premier ministre italien Matteo Renzi, a estimé que "ce n'est pas avec dix bateaux de plus ou de moins" que le problème sera réglé. "Si on ne parvient pas à régler le problème à la racine, on ne réussira jamais à le résoudre", a-t-il déclaré devant la presse, ajoutant que ce trafic d'êtres humains était une "plaie" pour le continent européen.

"On ne parle pas de choses banales, mais bien de vies humaines", a-t-il déclaré dimanche au cours d'une conférence de presse, à l'issue d'une réunion avec les ministres des Affaires étrangères, de la Défense et de l'Intérieur de son pays qui est l'un de ceux en première ligne pour l'accueil de ce nouvel afflux de réfugiés.

Le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, de son côté, a exhorté l'Europe à prendre des "initiatives diplomatiques pour un règlement pacifique du conflit en Syrie, en Irak et en Libye", d'où sont issus une grande partie des migrants.

Appel de l'ONU pour un partage de la charge des réfugiés

Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a appelé dimanche la communauté internationale à partager la prise en charge des réfugiés, après le naufrage en Méditerranée d'un bateau avec 700 migrants. M. Ban, qui s'est dit "choqué et profondément attristé" par l'annonce du naufrage, dans la nuit de samedi à dimanche au large des côtes libyennes, d'un chalutier qui aurait fait près de 700 morts, "appelle la communauté internationale à la solidarité et au partage de la charge face à cette crise", selon un communiqué publié par son porte-parole.

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